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Je reviens de PauP, mes impressions


Il y a un mois, jour pour jour, je profitais d’une belle journée ensoleillée comme il n’en existe qu’en Haïti. C’est à Thomassin, quartier au haut des montagnes au sud de PauP, que nous avons passé une bonne partie de notre journée. Nous étions conviés à un mariage. Pas n’importe quel mariage : un mariage de Baz! (Baz : cette petite famille dont j’ai hérité en disant oui à Hubby il y a plus de 11 ans. J)

Me voici donc un mois plus tard, contemplant une journée où les rayons de soleil ne réchauffent rien. Il fait -4oC dans la région aujourd’hui, température ressentie, -9. Quel contraste par rapport au mois précédent!

La chaleur me manque, mais j’ai repris mes habitudes. Bottes d’hiver, écharpe et manteau. Regarder la météo. Boulot, école, dodo. Rencontres en amis. La routine, quoi. Une routine qui, tout compte fait, n’est pas ennuyeuse.

Depuis mon retour, j’ai dû répondre une bonne douzaine de fois à l’inévitable « Kijan w kite Ayiti? » (Comment était Haiti?). En me posant cette question, ce n’est pas à un résumé de mes vacances que mes interlocuteurs s’attendent. Ils me demandent plutôt mon point de vue sur l’état global dans lequel j’ai retrouvé ma terre natale. Mes interlocuteurs : des dyaspora comme moi ou des amis Canadiens qui ont déjà foulé le sol haïtien.

Jusqu’à présent, ma réponse est invariablement la même, à quelques mots près : « J’ai été à PauP. Je ne peux pas parler du reste du pays. La ville subit présentement une invasion des motocyclettes. Il me semble que le fossé riche-pauvre s’est davantage creusé. J’ai encore l’impression que PauP est un chaudron de bouillon en ébullition qui risque de déborder à n’importe quel moment. »

J’ai été à PauP. Je ne peux pas parler du reste du pays.

J’apprends de plus en plus l’importance de souligner la différence entre la République de PauP et la République d’Haïti. Cependant, on ne peut nier que, centralisation oblige, tout ce qui se passe à PauP a des répercussions sur le reste du pays.

En bonne Port-au-Princienne qui se respecte, je suis coupable d’avoir souvent fait l’amalgame PauP = Haïti. J’avais tort il y a 20 ans, et j’aurais encore tort aujourd’hui. À l’époque, je voyais bien la différence entre l’atmosphère insoutenable qui régnait souvent à PauP et la tranquillité relative des villes de provinces. Mais il est difficile de se défaire des mauvaises habitudes.

Donc, mes impressions/opinions se limitent à la capitale. Certes, en décembre dernier je me suis rendue à une plage aux environs d’Arcahaie. Mais on s’entend que cela ne compte pas.

La ville subit une invasion des motocyclettes.

Les motos sont les nouveaux tyrans qui font la pluie et le beau au sein de la République de PauP. Il y en a partout! Elles sont le symbole du chaos qui règne sur la ville.

Anecdote. Il parait que certains conducteurs reçoivent moto et instructions sommaires au sujet de la manipulation de leurs engins — les leçons concernant le code de circulation sont de toute évidence optionnelles — le matin et que, l’après-midi du même jour, ils se retrouvent à transporter élèves, femmes enceintes ou machine à laver (!) d’un bout à l’autre de la ville.

Un item de plus sur la longue liste de problèmes que la ville doit résoudre.

La police aurait pourtant déclaré la guerre aux conducteurs circulant sans casques, m’a-t-on dit. Alors là! 1) Quid des passagers? Ils n’ont pas besoin de casques, eux? 2) Entre ignorance des règles de base de circulation, genre ne pas rouler en sens inverse de la circulation, et le port du casque, l’absence de ce dernier est évidemment la pire chose qui puisse arriver [y lire le sarcasme]. Mais, bon…

Le fossé riche-pauvre s’est davantage creusé.

C’est une impression plus qu’un fait tangible. Je n’ai pas les chiffres. (D’ailleurs, qui les a?) Il se pourrait que je me trompe. Au fait, j’aimerais bien me tromper.

Je constate seulement que là où il n’y avait aucune personne pour « garder un œil » sur ma voiture en 2005, il y en a maintenant 3 ou 4. Là où une seule personne nous aidait à trouver un stationnement, il y en a maintenant 4 ou 5. Je pense aussi que le nombre de mendiants va en augmentant.

Parallèlement, les bals et autres pwogram affichaient leurs prix en dollars U.S. Les voitures de luxe pullulent. Sans exagération, j’ai vu plus de Mercedes classe G à PauP en 10 jours que je n’en ai vu en plus de 10 ans dans la région Ottawa-Gatineau.

Rien de nouveau sous le ciel bleu. Cette disparité a toujours été flagrante. Comme je l’ai écrit ailleurs, rien n'a changé, pourtant tout est différent.

L’impression que PauP est un chaudron de bouillon en ébullition qui risque de déborder à n’importe quel moment.

Lorsque je décris la situation socio-économique de PauP, je la compare toujours à un bouillon en ébullition qui risque, à tout moment, de déborder. J’ai cette impression depuis le début des années 2000. J’ai fait le triste constat qu’elle habite encore mon esprit. Une idée un peu sinistre (c’est le moins qu’on puisse dire!) qui veut que PauP soit sur le point de connaître un chambardement. Mais cela fait longtemps que cela dure. Ce chamboulement n’aura peut-être jamais lieu.

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